Prisces
Eglise de la Nativité-de-la-Sainte-Vierge. Certainement la tour-donjon la plus haute de Thiérache (vingt cinq mètres). Ce très haut donjon est flanqué, aux extrémités d’une
diagonale, de deux tours cylindriques, permettant à la fois l’accès aux étages de salles de défense, d’oberver tout autour de l’église, et d’envoyer des tirs flanqués pour la défense des murs de
l’église. Le corps central du donjon ne comporte pas de meurtrières. Le diamètre des tours va en rétrécissant, lorsqu’on s’élève vers le haut du donjon. La tour de gauche mesure trois mètres de
diamètre, et contient quatre ou cinq étages de défense, formant des postes de combat. La tour opposée contient un escalier à vis, et des meurtrières qui permettent des tirs sur les deux côtés du
donjon. Au dessus du vestibule, des salles de défense mesurent sept mètres au carré. Le mur très épais du donjon, est élevé, pour l’extérieur en briques, et pour la partie centrale en pierres
blanches. L’intérieur est parfois en briques, parfois en pierres. Cette alliance des deux matériaux est courante. En effet, la brique est plus souple d’emploi, et résiste mieux aux coups des
armes à feu, que la pierre. De plus, elle demande moins de force physique pour sa mise en oeuvre, et ainsi les réparations après les attaques sont plus faciles. Il est donc courant que des
donjons ou des tours soient constitués de murs élevés avec les deux matériaux : un intérieur en pierres, et un parement en briques. Les voûtes et les planchers des divers étages ont
disparu.
Cet édifice a connu au XIXème siècle, une aventure assez extraordinaire : la rébellion des femmes du village.
En 1848, le gouvernement impose un impôt nouveau, «les quarante cinq centimes», qui devient rapidement très impopulaire, surtout dans les ménages ouvriers à faible revenu. La loi est vôtée, les
Prefets et sous-Prefets chargés de son application par les percepteurs. Une note de la Préfecture incite dailleurs les percepteurs à la plus grande rigueur et à la plus grande sévérité. Dans la
commune de Prisces, le jour de la perception de l’impôt, la révolte gronde. Ce sont surtout les femmes, directement touchées dans le budget du ménage, qu’on entend le plus. Le percepteur est
«isolé» dans sa maison de Prisces. Il va même jusqu’à ressortir le vieux fusil qu’il rangeait habituellement dans l’immense horloge de parquet de son salon. Il veille dans la cour de la maison,
le fusil au bras. La rumeur de la révolte arrive vite à Vervins ! Une réunion de crise s’improvise à la Sous-Préfecture... Les forces disponibles sont réunies... Gendarmes, pompiers, tous se
prêtent volontaires pour mater la rébéllion ! Les femmes, voulant observer l’arrivée des forces publiques, se sont enfermées dans le donjon de l’église. La troupe est aperçue, venant du chemin de
Lugny. Au moment de franchir le petit pont de la rivière, l’officier des pompiers s’engage fièrement en premier... et finit tout habillé dans la rivière... Quelqu’un aurait-il sournoisement scié
les poutres du petit pont ? On le ramène sans trop de mal... C’est que la rivière n’est pas bien large ! Du côté du village, le tocsin sonne. Les femmes ont vu la scène. Quelques temps plus tard,
la troupe des paysans rassemblés sur la place, face à la demeure du percepteur est assez rapidement dispersée. L’ardeur de l’officier de pompiers n’a de pareille que l’humidité de son uniforme.
Il ne reste plus que les femmes qui sont réfugiées dans le clocher-donjon. De la paille humide, à laquelle on met le feu, aura raison de leur vaillance ; elles sortent petit à petit,
toussant et crachant la fumée... L’affaire sera définitivement close dans les mois suivants, quand un jugement au tribunal de Vervins infligera tout de même amendes et jours de prison. Tout de
même...!
Anecdote... Du 21 janvier au 9 février 1918, Prisces est le lieu de cantonnement du caporal Hitler.